Mlle. Fifi

Guy de Maupassant
Mlle Fifi, by Guy de Maupassant

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Title: Mlle Fifi Nouveaux Contes
Author: Guy de Maupassant
Release Date: March 15, 2004 [EBook #11597]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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GUY DE MAUPASSANT
Mlle FIFI

NOUVEAUX CONTES.

MADEMOISELLE FIFI. MADAME BAPTISTE. LA ROUILLE.
MARROCA. LA BUCHE. LA RELIQUE. LE LIT. FOU?. RÉVEIL.
UNE RUSE. A CHEVAL. UN RÉVEILLON. MOTS D'AMOUR.
UNE AVENTURE PARISIENNE. DEUX AMIS. LE VOLEUR. NUIT
DE NOEL. LE REMPLAÇANT.

MADEMOISELLE FIFI
Le major, commandant prussien, comte de Farlsberg, achevait de lire
son courrier, le dos au fond d'un grand fauteuil de tapisserie et ses pieds
bottés sur le marbre élégant de la cheminée, où ses éperons, depuis trois
mois qu'il occupait le château d'Uville, avaient tracé deux trous
profonds, fouillés un peu plus tous les jours.
Une tasse de café fumait sur un guéridon de marqueterie maculé par les
liqueurs, brûlé par les cigares, entaillé par le canif de l'officier
conquérant qui, parfois, s'arrêtant d'aiguiser un crayon, traçait sur le
meuble gracieux des chiffres ou des dessins, à la fantaisie de son rêve
nonchalant.
Quand il eut achevé ses lettres et parcouru les journaux allemands que
son vaguemestre venait de lui apporter, il se leva, et, après avoir jeté au
feu trois ou quatre énormes morceaux de bois vert, car ces messieurs
abattaient peu à peu le parc pour se chauffer, il s'approcha de la fenêtre.
La pluie tombait à flots, une pluie normande qu'on aurait dit jetée par
une main furieuse, une pluie en biais, épaisse comme un rideau,
formant une sorte de mur à raies obliques, une pluie cinglante,
éclaboussante, noyant tout, une vraie pluie des environs de Rouen, ce
pot de chambre de la France.
L'officier regarda longtemps les pelouses inondées, et, là-bas, l'Andelle
gonflée qui débordait; et il tambourinait contre la vitre une valse du

Rhin, quand un bruit le fit se retourner: c'était son second, le baron de
Kelweingstein, ayant le grade équivalent à celui de capitaine.
Le major était un géant, large d'épaules, orné d'une longue barbe en
éventail formant nappe sur sa poitrine; et toute sa grande personne
solennelle éveillait l'idée d'un paon militaire, un paon qui aurait porté
sa queue déployée à son menton. Il avait des yeux bleus, froids et doux,
une joue fendue d'un coup de sabre dans la guerre d'Autriche; et on le
disait brave homme autant que brave officier.
Le capitaine, un petit rougeaud à gros ventre, sanglé de force, portait
presque ras son poil ardent, dont les fils de feu auraient fait croire,
quand ils se trouvaient sous certains reflets, sa figure frottée de
phosphore. Deux dents perdues dans une nuit de noce, sans qu'il se
rappelât au juste comment, lui faisaient cracher des paroles épaisses
qu'on n'entendait pas toujours; et il était chauve du sommet du crâne
seulement, tonsuré comme un moine, avec une toison de petits cheveux
frisés, dorés et luisants, autour de ce cerceau de chair nue.
Le commandant lui serra la main, et il avala d'un trait sa tasse de café
(la sixième depuis le matin), en écoutant le rapport de son subordonné
sur les incidents survenus dans le service; puis tous deux se
rapprochèrent de la fenêtre en déclarant que ce n'était pas gai. Le major,
homme tranquille, marié chez lui, s'accommodait de tout; mais le baron
capitaine, viveur tenace, coureur de bouges, forcené trousseur de filles,
rageait d'être enfermé depuis trois mois dans la chasteté obligatoire de
ce poste perdu.
Comme on grattait à la porte, le commandant cria d'ouvrir, et un
homme, un de leurs soldats automates, apparut dans l'ouverture, disant
par sa seule présence que le déjeuner était prêt.
Dans la salle ils trouvèrent les trois officiers de moindre grade: un
lieutenant, Otto de Grossling; deux sous-lieutenants, Fritz
Scheunaubourg et le marquis Wilhem d'Eyrik, un tout petit blondin fier
et brutal avec les hommes, dur aux vaincus, et violent comme une arme
à feu.

Depuis son entrée en France, ses camarades ne l'appelaient plus que
Mlle Fifi. Ce surnom lui venait de sa tournure coquette, de sa taille fine
qu'on aurait dit tenue en un corset, de sa figure pâle où sa naissante
moustache apparaissait à peine, et aussi de l'habitude qu'il avait prise,
pour exprimer son souverain mépris des êtres
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