Les femmes dartistes

Alphonse Daudet

Les femmes d'artistes

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Title: Les femmes d'artistes
Author: Alphonse Daudet
Release Date: January 20, 2006 [EBook #17550]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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LES FEMMES D'ARTISTES
PAR
ALPHONSE DAUDET
PARIS ALPHONSE LEMERRE, ��DITEUR M DCCC LXXVIII

PROLOGUE
Etendus, le cigare aux l��vres, sur un large divan d'atelier, deux amis---un po?te et un peintre---causaient un soir apr��s d?ner.
C'��tait l'heure des effusions, des confidences. La lampe ��clairait doucement sous l'abat-jour, limitant son cercle de flamme �� l'intimit�� de la causerie, laissant �� peine distinct le luxe capricieux des vastes murailles encombr��es de toiles, de panoplies, de tentures, et termin��es tout en haut par un vitrage o�� le bleu sombre du ciel p��n��trait librement. Seul, un portrait de femme, l��g��rement pench�� en avant comme pour ��couter, sortait �� moiti�� de l'ombre, jeune, les yeux intelligents, la bouche grave et bonne, avec un sourire spirituel qui semblait d��fendre le chevalet du mari contre les sots et les d��courageux. Une chaise basse ��cart��e du feu, deux petits souliers bleus tra?nant sur le tapis indiquaient aussi la pr��sence d'un enfant dans la maison; et, en effet, de la chambre �� c?t��, o�� la m��re et le b��b�� venaient de dispara?tre, sortaient par bouff��es des rires doux, des gazouillements, le joli train d'un nid qui s'endort. Tout cela r��pandait dans cet int��rieur artistique un vague parfum de bonheur familial que le po?te aspirait avec d��lices:
?D��cid��ment, mon cher, disait-il �� son ami, c'est toi qui as eu raison. Il n'y a pas plusieurs fa?ons d'��tre heureux. Le bonheur est l��, rien que l��... Il faut que tu me maries.?
Le Peintre.
Ma foi! non, par exemple... Marie-toi tout seul, si tu y tiens. Moi je ne m'en m��le pas.
Le Po?te.
Et pourquoi?
Le Peintre.
Parce que... parce que les artistes ne doivent pas se marier.
Le Po?te.
Voil�� qui est trop fort... Tu oses dire cela ici, et la lampe ne s'��teint pas brusquement, les murailles ne croulent pas sur ta t��te... Mais songe donc, malheureux, que tu viens de me donner pendant deux heures le spectacle et l'envie de ce bonheur que tu me d��fends. Serais-tu par hasard comme ces mauvais riches qui doublent leur bien-��tre des souffrances des autres, et savourent mieux le coin de leur feu en songeant qu'il pleut dehors et qu'il y a de pauvres diables sans abri?...
Le Peintre.
Pense de moi ce que tu voudras. Je t'aime trop pour t'aider �� faire une sottise, une sottise irr��parable.
Le Po?te.
Voyons. Qu'y a-t-il? Tu n'es donc pas content?... Il me semble pourtant qu'on respire le bonheur ici aussi largement que l'air du ciel �� une fen��tre de campagne.
Le Peintre.
Tu as raison. Je suis heureux, compl��tement heureux. J'aime ma femme �� plein coeur. Quand je pense �� mon enfant, je ris tout seul de plaisir. Le mariage a ��t�� pour moi un port aux eaux calmes et s?res, non pas celui o�� l'on s'accroche d'un anneau �� la rive au risque de s'y rouiller ��ternellement, mais une de ces anses bleues o�� l'on r��pare les voiles et les mats pour des excursions nouvelles aux pays inconnus. Je n'ai jamais si bien travaill�� que depuis mon mariage, et mes meilleurs tableaux datent de l��.
Le Po?te.
Eh bien, alors!
Le Peintre.
Mon cher, au risque de te para?tre fat, je te dirai que je regarde mon bonheur comme une sorte de miracle, quelque chose d'anormal et d'exceptionnel. Oui, plus je vois ce que c'est que le mariage, plus je suis ��pouvant�� de la chance que j'ai eue. Je ressemble �� ces ignorants du danger qui l'ont travers�� sans s'en apercevoir, et qui palissent apr��s coup, stup��faits de leur propre audace.
Le Po?te.
Mais quels sont donc ces dangers si terribles?...
Le Peintre.
Le premier, le plus grand de tous, est de perdre son talent et de l'amoindrir. Ceci compte, je crois, pour un artiste... Car remarque bien qu'en ce moment je ne parle pas des conditions ordinaires de la vie. Je conviens qu'en g��n��ral le mariage est une chose excellente et que la plupart des hommes ne commencent �� compter que lorsque la famille les compl��te ou les agrandit. Souvent m��me, c'est une exigence de profession. Un notaire gar?on ne s'imagine pas. ?a n'aurait pas l'air pos��, ��toff��... Mais pour nous tous, peintres, po?tes, sculpteurs, musiciens, qui vivons en dehors de la vie, occup��s seulement �� l'��tudier, �� la reproduire, en nous tenant toujours un peu loin d'elle, comme on se
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