Le legs de Caïn

Leopold von Sacher-Masoch
Le legs de Caïn

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Title: Le legs de Caïn Un Testament -- Basile Hymen -- Le Paradis sur
le Dniester
Author: Leopold Ritter von Sacher-Masoch
Release Date: August 3, 2005 [EBook #16421]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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DE CAÏN ***

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CALMANN LÉVY, ÉDITEUR
DU MÊME AUTEUR
Format grand in-18.

LE CABINET NOIR DE LEMBERG 1 vol. L'ENNEMI DES
FEMMES 1 vol. NOUVEAUX RÉCITS GALICIENS 1 vol. LES
PRUSSIENS D'AUJOURD'HUI 2 vol.
PARIS.--IMP. DE LA SOC. ANON. DE PUBL. PÉRIOD.--P.
MOUILLOT.

LE LEGS DE CAIN

UN TESTAMENT BASILE HYMEN LE PARADIS SUR LE
DNIESTER
PAR
SACHER-MASOCH

NOUVELLE ÉDITION PARIS CALMANN LÉVY, ÉDITEUR
ANCIENNE MAISON MICHEL LÉVY FRÈRES 3, RUE AUBER, 3
1884

UN TESTAMENT

La pire pauvreté, c'est l'avarice du riche.
--Un testament insensé, un testament qui crie contre le ciel! avait
coutume de dire le notaire Batschkock chaque fois qu'il était question
des volontés dernières de la baronne Bromirska; jamais un être sorti des
mains de Dieu et doué d'une dose quelconque de bon sens ne fit
d'absurdité semblable! Il y a de quoi rire! Prendre pour héritier un
quadrupède! Il y a de quoi mourir de rire!--Le notaire, par parenthèse,

ne laissait jamais échapper l'occasion de rire avec bruit. Cette affaire de
testament mérite du reste d'être racontée:
I
Dans le chef-lieu d'un cercle de la Gallicie occidentale vivait, il n'y a
pas bien longtemps, un employé polonais du nom de Gondola, qui,
moins par son mérite qu'à force de persévérance (il comptait plus de
quarante années de service), finit par être nommé commissaire du
cercle. Sa femme, une grande Polonaise, maigre à faire peur, lui avait
donné une fille qui eut d'abord la mine d'une petite bohémienne,
promettant à peine de devenir gentille, ce qui ne l'empêcha point d'être
à dix ans tout à fait supportable, piquante à quatorze ans, et, vers l'âge
de seize ans, une beauté. Gondola lui-même eût été dans l'ancienne
Rome un gladiateur de bonne mine, et à Potsdam un de ces grenadiers
dont Frédéric-Guillaume se plaisait à immortaliser les larges épaules en
ajoutant leur portrait à la galerie du château. Sa nuque était celle d'un
taureau; ses mains eussent étranglé le lion de Némée, ou roulé un plat
d'étain comme une gaufre; quant à sa tête, elle eût fait honneur au
sultan Soliman. Cette inquiétante vigueur était tempérée par
l'expression mielleuse de la physionomie; personne n'avait le sourire
plus humble, l'échiné plus souple que M. Gondola. Bien qu'il parût ne
jamais se soucier de l'avenir et tenir uniquement à jouir de la vie en
dépensant ses revenus avec toute l'élégante légèreté d'un vrai
gentilhomme polonais, il s'entendait à profiter de sa position et à
remplir ses coffres. Sa femme et sa fille, la Panna Warwara, l'aidaient
de leur mieux; elles étaient ingénieuses à découvrir toujours de
nouvelles ressources, mais il les surpassait encore en habileté. Avant
1848, les plaintes des paysans contre leurs propriétaires remplissaient
les bailliages galliciens; et toutes ces plaintes, sans exception, passaient
par les mains de M. Gondola. Il était donc naturel que les
gentilshommes lui fissent la cour. On ne lui donnait pas le bonjour, on
se jetait à ses pieds, en paroles, cela va sans dire, mais il comprenait ces
paroles à la façon de certaines dames de théâtre qui tendent la main
quand on leur offre son coeur. S'agissait-il par exemple d'un paysan à
demi mort, assommé par un seigneur qui prenait tous les saints de
l'Église romaine à témoin de son innocence, M. Gondola était bien trop

poli pour rudoyer le coupable. Non, il lui offrait un fauteuil et se
contentait de faire observer en soupirant que c'était là une mauvaise
affaire sur laquelle se prononceraient les tribunaux. Là-dessus, le tyran
de village croyait déjà sentir autour de son cou les deux grandes mains
du commissaire; il rougissait, perdait haleine, suppliait, implorait, mais
sans réussir à émouvoir ce représentant intègre de l'autorité.
--Vous avez là, commençait d'un air indifférent M. Gondola, des
chevaux superbes et une jolie voiture. Que vous êtes heureux! Un
pauvre diable de ma sorte n'a jamais l'occasion de conduire en si bel
équipage sa femme et son enfant!
Cette simple réflexion produit l'effet désiré; depuis lors, la voiture est
toujours
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