La grande ombre | Page 2

Sir Arthur Conan Doyle
de West Inch s'engageant pour aller chasser l'Ombre qu'il croit sentir peser sur l��Europe.
Nul ne peint mieux son petit coin de bataille, les conscrits saluant involontairement les balles, les vieux soldats les raillant d'un ton goguenard et les officiers les laissant s'aguerrir avant de les faire coucher. Nul ne dit mieux, au matin du combat, les revues pass��es par l'��tat-major empanach��, les cavaliers chamarr��s d'argent, d'��carlate et d'or, circulant au galop, au milieu des cris d'enthousiasme et des hourras. Puis apr��s plusieurs heures de combat, la chevauch��e des cuirassiers chargeant et la mont��e des bataillons de la Vieille-Garde se ruant sur les carr��s anglais avec une rage d��sesp��r��e.
ALBERT SAVINE.
I -- LA NUIT DES SIGNAUX
Me voici, moi, Jock Calder, de West Inch, arriv�� �� peine au milieu du dix-neuvi��me si��cle, et �� l��age de cinquante-cinq ans.
Ma femme ne me d��couvre gu��re qu'une fois par semaine derri��re l'oreille un petit poil gris qu'elle tient �� m'arracher.
Et pourtant quel ��trange effet cela me fait que ma vie se soit ��coul��e en une ��poque o�� les fa?ons de penser et d'agir des hommes diff��raient autant de celles d'aujourd'hui que s'il se fut agi des habitants d'une autre plan��te.
Ainsi, lorsque je me prom��ne par la campagne, si je regarde par l��-bas, du c?t�� de Berwick, je puis apercevoir les petites tra?n��es de fum��e blanche, qui me parlent de cette singuli��re et nouvelle b��te aux cent pieds, qui se nourrit de charbon, dont le corps rec��le un millier d'hommes, et qui ne cesse de ramper le long de la fronti��re.
Quand le temps est clair, j'aper?ois sans peine le reflet des cuivres, lorsqu'elle double la courbe vers Corriemuir.
Puis, si je porte mon regard vers la mer, je revois la m��me b��te, ou parfois m��me une douzaine d'entre elles, laissant dans l'air une trace noire, dans l'eau une tache blanche, et marchant contre le vent avec autant d'aisance qu'un saumon remonte la Tweed.
Un tel spectacle aurait rendu mon bon vieux p��re muet de col��re autant que de surprise, car il avait la crainte d'offenser le Cr��ateur, si profond��ment enracin��e dans l'ame, qu'il ne voulait pas entendre parler de contraindre la Nature, et que toute innovation lui paraissait toucher de bien pr��s au blasph��me.
C'��tait Dieu qui avait cr���� le cheval.
C'��tait un mortel de l��-bas, vers Birmingham, qui avait fait la machine.
Aussi mon bon vieux papa s'obstinait-il �� se servir de la selle et des ��perons.
Mais il aurait ��prouv�� une bien autre surprise en voyant le calme et l'esprit de bienveillance qui r��gnent actuellement dans le coeur des hommes, en lisant dans les journaux et entendant dire dans les r��unions qu'il ne faut plus de guerre, except�� bien entendu, avec les n��gres et leurs pareils.
Quand il mourut, ne nous battions-nous pas, presque sans interruption -- une tr��ve de deux courtes ann��es -- depuis bient?t un quart de si��cle?
R��fl��chissez �� cela, vous qui menez aujourd'hui une existence si tranquille, si paisible.
Des enfants, n��s pendant la guerre, ��taient devenus des hommes barbus, avaient eu �� leur tour des enfants, que la guerre durait encore.
Ceux qui avaient servi et combattu �� la fleur de l'age et dans leur pleine vigueur, avaient senti leurs membres se raidir, leur dos se vo?ter, que les flottes et les arm��es ��taient encore aux prises.
Rien d'��tonnant, d��s lors, qu'on en f?t venu �� consid��rer la guerre comme l'��tat normal, et qu'on ��prouvat une sensation singuli��re �� se trouver en ��tat de paix.
Pendant cette longue p��riode, nous nous batt?mes avec les Danois, nous nous batt?mes avec les Hollandais, nous nous batt?mes avec l'Espagne, nous nous batt?mes avec les Turcs, nous nous batt?mes avec les Am��ricains, nous nous batt?mes avec les gens de Montevideo.
On e?t dit que dans cette m��l��e universelle, aucune race n'��tait trop proche parente, aucune trop distante pour ��viter d'��tre entra?n��e dans la querelle.
Mais ce fut surtout avec les Fran?ais que nous nous batt?mes; et de tous les hommes, celui qui nous inspira le plus d'aversion, et de crainte et d'admiration, ce fut ce grand capitaine qui les gouvernait.
C'��tait tr��s crane de le repr��senter en caricature, de le chansonner, de faire comme si c'��tait un charlatan, mais je puis vous dire que la frayeur qu'inspirait cet homme planait comme une ombre noire au-dessus de l'Europe enti��re, et qu'il fut un temps o�� la clart�� d'une flamme apparaissant de nuit sur la c?te faisait tomber �� genoux toutes les femmes et mettait les fusils dans les mains de tous les hommes.
Il avait toujours gagn�� la partie: voil�� ce qu'il y avait de terrible.
On e?t dit qu'il portait la fortune en croupe.
Et en ces temps-l�� nous savions qu'il ��tait post�� sur la c?te septentrionale avec cent cinquante mille v��t��rans, avec les bateaux n��cessaires au passage.
Mais c'est une vieille histoire.
Chacun sait comment notre petit homme borgne et manchot an��antit leur flotte.
Il devait rester en Europe une terre o�� l'on e?t
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