Jean Racine

Jules Lemaître
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The Project Gutenberg EBook of Jean Racine, by Jules Lemaître
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Title: Jean Racine
Author: Jules Lemaître
Release Date: January 22, 2007 [EBook #20414]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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RACINE ***
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JULES LEMAÎTRE
JEAN RACINE
PARIS
CALMANN-LÉVY, ÉDITEURS
PREMIÈRE CONFÉRENCE[1]
SON ENFANCE.--SON ÉDUCATION

Pourquoi vous parlé-je cette année de Racine? Tout simplement parce
que c'est Racine qu'on m'a le plus «demandé», et que, d'ailleurs, cela ne
me déplaisait point.
Je pourrais vous dire aussi qu'ayant étudié Jean-Jacques Rousseau l'an
dernier, j'ai cherché un effet de contraste: Racine, traditionaliste;
Rousseau, révolutionnaire; Racine, catholique français, monarchiste;
Rousseau, protestant genevois, républicain; Racine, artiste pur;
Rousseau, philosophe et promoteur d'idées... Mais ce parallèle, suggéré
par un hasard, serait fort artificiel, et j'aime mieux vous avouer qu'il y a
peu de rapports, sinon antithétiques, et encore pas sur tous les points,
entre les deux personnages (quoiqu'il y en ait peut-être entre _la
Nouvelle Héloïse_ et le théâtre de Racine, père indirect du roman
passionnel).
Ce qui est sûr, c'est que je suis content de n'avoir plus à examiner et à
juger les idées. Dans l'art pur et dans la connaissance des âmes et des
moeurs,--qui fut une des occupations du XVIIe siècle,--on peut arriver
à quelque chose de solide et de définitif: dans la philosophie ou la
critique ou les sciences politiques et sociales, je ne sais pas. Il y a tel
écrivain du XIXe siècle qui vous paraît peut-être plus intelligent que
Racine, ou qui, du moins, a su plus de choses que lui, et qui, en outre,
s'est donné des libertés sur des points où Racine s'est contenu et
abstenu. Mais, au bout du compte, si les philosophes et les critiques
nous retiennent, c'est moins par la somme assez petite de vérité qu'ils
ont atteinte que par les jeux--quelquefois ignorés d'eux-mêmes--de leur
sensibilité et de leur imagination et par le caractère de beauté de leurs
ouvrages. Oh! que je suis heureux que Racine n'ait pas été un «esprit
fort», ce qu'on appelle vaniteusement un «penseur», qu'il n'ait été
savant qu'en grec, et qu'il n'ait cherché qu'à faire de belles
représentations de la vie humaine!
À cause de cela nous l'aimons aujourd'hui, je pense, plus qu'on n'a
jamais fait.
Et cependant on l'a beaucoup aimé déjà au XVIIe siècle (aimé autant
que haï). Il a eu pour lui, tout de suite, le roi, la jeune cour, et la plus
grande partie de sa génération. Boileau et ses amis le préfèrent,

secrètement d'abord, puis publiquement, à Corneille. La Bruyère écrit
en 1693: «Quelques-uns ne souffrent pas que Corneille lui soit préféré,
quelques autres qu'il lui soit égalé.» Au XVIIIe siècle, tout le monde, à
la suite de Voltaire, adore Racine, le juge parfait. Vauvenargues
l'appelle: «le plus beau génie que la France ait eu». Cela dure
longtemps, jusqu'aux romantiques. Ceux-ci exaltent fort justement
Corneille: mais ils jugent Racine à travers l'insupportable tragédie
pseudo-classique du XVIIIe siècle et de l'Empire,--qui, d'ailleurs, est
plutôt cornélienne et dont Racine n'est pas responsable.
Aujourd'hui, je le répète, Racine est extrêmement en faveur. On l'aime
plus que jamais, un peu par réaction contre le mensonge et l'illusion
romantiques. Et en même temps, on peut dire que le romantisme, qui
méconnaissait si niaisement Racine, nous a cependant aidés à le mieux
comprendre et nous a incités à découvrir chez notre poète--fût-ce un
peu par malice et esprit de contradiction--les choses même dont le
romantisme se piquait le plus: pittoresque, vérité hardie, poésie,
lyrisme.
Racine est, en effet, de ceux que l'on «découvre» toujours davantage.
C'est pour cela que beaucoup ont commencé par ne le goûter que
modérément, et ont fini par le chérir. Tel Sainte-Beuve, qui le traite fort
strictement dans ses premiers articles, mais généreusement et
magnifiquement dans son _Port-Royal_. Tel encore notre Francisque
Sarcey. À ses débuts, Sarcey ne voyait en Racine qu'un orateur
harmonieux, assez peu «homme de théâtre». À la fin, il le trouve aussi
malin que d'Ennery.
Nous apportons aussi à aimer Racine un sentiment qui est une sorte de
nationalisme littéraire. Après Corneille, Normand impressionné par les
Romains et les Espagnols, très grand inventeur, mais artiste inégal,
Racine, homme de l'Île-de-France, principalement ému par la beauté
grecque, a vraiment «achevé» et porté à son point suprême de
perfection la _tragédie_, cette étonnante forme d'art, et
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