Histoires incroyables, Tome II

Jules Lermina
Histoires incroyables, Tome II

Project Gutenberg's Histoires incroyables, Tome II, by Jules Lermina
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Title: Histoires incroyables, Tome II
Author: Jules Lermina
Release Date: May 18, 2006 [EBook #18416]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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INCROYABLES, TOME II ***

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HISTOIRES INCROYABLES
PAR

JULES LERMINA
TOME DEUXIÈME
PARIS, L. BOULANGER, ÉDITEUR 90, boulevard Montparnasse, 90
COLLECTION LECTURES POUR TOUS AVENTURES ET
VOYAGES La liste des volumes composant cette collection se trouve à
la fin de l'ouvrage.

LA CHAMBRE D'HÔTEL

I
J'ai toujours eu, je ne sais pourquoi, une tendance à m'intéresser aux
procès de cours d'assises. Je ne suis certes pas seul à nourrir cette
curiosité, et je ne prétends point non plus par là justifier
l'étrangeté--d'autres disent l'inconvenance--de ce goût exagéré. Je le
constate, et rien de plus. Pas un procès de quelque importance ne se
plaide sans que je sois immédiatement à l'affût des moindres détails,
des plus insignifiantes particularités. Dès que l'affaire est entamée, je
me forme une opinion, je discute l'accusation, j'établis les plaidoiries, je
devance le verdict, et ce m'est une réelle satisfaction d'amour-propre
lorsque je ne me suis pas trompé.
--Voici une affaire, disais-je ce soir-là à mon ami Maurice Parent, qui
ne donnera pas grand'peine à messieurs de la cour...
--De quoi s'agit-il?
--Écoute le récit sommaire. Un étudiant, nommé Beaujon, a assassiné,
par jalousie, un de ses camarades d'étude, Defodon. La justice a
retrouvé tous les fils de l'affaire; c'était mieux que jamais le cas de dire:
«Où est la femme?» Et il n'a pas été difficile de la découvrir.
Je jetai à mon ami le journal que je tenais à la main, en ajoutant:

--Procès banal!
Maurice regarda ces quelques lignes, concernant l'affaire; puis, repliant
le journal:
--Ainsi, me dit-il, pour toi, ces renseignements, donnés peut-être à la
légère, te suffisent, et ton opinion est faite?...
--Puisque le doute n'est pas possible! Je ne m'en préoccupe d'ailleurs
pas. C'est là un de ces accidents de trop peu d'importance pour qu'ils
s'imposent à mon attention.
Maurice réfléchit un moment:
--Voilà, reprit-il, une des plus singulières dispositions de l'esprit
humain. Dès qu'un événement se produit, un point frappe, commande
aussitôt l'attention, et de ce point, souvent secondaire en réalité, on fait
le pivot de toute une argumentation. Il suffit qu'un souverain ait une
fois laissé échapper un mot de bienveillance, pour que le surnom de
juste ou de généreux s'attache à son nom: c'est ainsi qu'Henri IV est
devenu le père du peuple de par la poule au pot. Et de même en toutes
choses. Cette observation s'applique tout particulièrement aux procès
criminels. Sur une circonstance qui ne présente le plus souvent aucun
intérêt sérieux, vous bâtissez tout un système de déductions, et votre
décision répond, non pas à l'ensemble des faits véritables, mais à la
suite d'idées qu'un simple détail a éveillées en vous...
--Il est cependant des cas où l'évidence est telle que ce serait une folie
que de se refuser à la constater.
--L'évidence prétendue est la source même de toutes les erreurs.
Ces affirmations me piquaient au vif. J'en sentais la justesse, mais ne
voulais point m'y rendre. Si bien que je proposai à Maurice d'assister au
procès de Beaujon, certain que j'étais de réduire ses théories à néant par
la simplicité même de l'affaire et l'impossibilité où il se trouverait
nécessairement de discuter cette évidence qu'il niait.

Pendant que nous nous rendions au Palais, j'escomptais déjà le plaisir
que j'aurais plus tard à confondre ses théories. Il m'écouta longtemps;
seulement un sourire soulevait sa lèvre. Je m'impatientais de cette
ironie latente; il reprit tout à coup sa physionomie sérieuse.
--Mon cher ami, me dit-il, je vous affirme que dans la plupart des cas
les accusés sont condamnés ou acquittés, non en raison des
circonstances réelles de l'événement auquel ils se sont trouvés mêlés,
mais bien d'après un système que bâtit à son propre usage soit
l'accusation, soit la défense. L'esprit humain est ainsi fait que l'accusé,
alors même que son sort dépend d'une franchise absolue, cache
volontairement une série de détails qui, pour paraître insignifiants, ne
constituent pas moins le plus souvent le canevas réel de l'affaire.
L'amour-propre est le plus fort, mais un amour-propre mesquin et étroit.
L'homme avouera avoir frappé sa victime, mais niera par exemple
qu'elle lui ait reproché sa laideur ou un
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