Discours Civiques de Danton | Page 4

Georges Jacques Danton
lui. Il ne va point pour ce jusqu'�� la grossi��ret��, cette grossi��ret�� de jouisseur, de grand mangeur, de mat��rialiste, qu'on lui attribue si volontiers. "Aucune de ses harangues ne fournit d'indices de cette grossi��ret��", dit le Dr Robinet. [Note: Ibid., p. 67.] Et quand m��me cela e?t ��t��, quand m��me elles eussent eu cette violence et cette exag��ration que demande le peuple �� ses orateurs, en quoi diminueraient-elles la m��moire du Conventionnel?" Je porte dans mon caract��re une bonne portion de gaiet�� fran?aise", a-t-il r��pondu. [Note: S��ance de la Convention, du 16 mars 1794.] Mais cette gaiet�� fran?aise, c'est celle-l�� m��me du pays de Rabelais. Si Pantagruel est grossier, Danton a cette grossi��ret��-l��.
Il sait qu'on ne parle point au peuple comme on parle �� des magistrats ou a des l��gislateurs, qu'il faut au peuple le langage rude, simple, franc et net du peuple. Paris n'a-t-il point baill�� �� l'admirable morceau de froid lyrisme et de noble ��loquence de Robespierre pour la f��te de l'��tre Supr��me? C'est en vain que, sur les gradins du Tribunal r��volutionnaire, Vergniaud d��roula les plus harmonieuses p��riodes classiques d'une d��fense �� la grande fa?on. Mais Danton n'eut �� dire que quelques mots, �� sa mani��re, et la salle se dressa tout �� coup vers lui, contre la Convention. Il fallut le baillon d'un d��cret pour museler le grand dogue qui allait r��veiller la conscience populaire.
L�� seul fut l'art de Danton. La R��volution venait d'en bas, il descendit vers elle et ne demeura pas, comme Maximilien Robespierre, �� la place o�� elle l'avait trouv��. Par l��, il sut mieux ��tre l'��cho des d��sirs, des besoins, le cri vivant de l'h��ro?sme exasp��r��, le tonnerre de la col��re port��e �� son summum. Il fut la R��volution tout enti��re, avec ses haines fran?aises, ses fureurs, ses espoirs et ses illusions. Robespierre, au contraire, la domina toujours et, jacobin, resta aristocrate parmi les jacobins. Derri��re la guillotine du 10 thermidor s'��rige la Minerve antique, porteuse du glaive et des tables d'airain. Derri��re la guillotine du 16 germinal se dresse la France bless��e, ��chevel��e et libre, la France de 93. Ne cherchons pas plus loin. De l�� la popularit�� de Danton; de l�� l'hostilit�� haineuse o�� le peuple roula le cadavre sacrifi�� par la canaille de thermidor �� l'id��al jacobin et fran?ais.

II
La Patrie! Point de discours o�� le mot ne revienne. La Patrie, la France, la R��publique; point de plus haut id��al propos�� �� ses efforts, �� son courage, �� son civisme. Il aime son pays, non point avec cette fureur jalouse qui fait du patriotisme un monopole �� exploiter, il l'aime avec respect, avec admiration. Il s'incline devant cette terre o�� fut le berceau de la libert��, il s'agenouille devant cette patrie qui, aux nations asservies, donne l'exemple de la lib��ration. C'est bien ainsi qu'il se r��v��le comme imbu de l'esprit des encyclop��distes [Note: F. AULARD, oevr. cit., tome I, p. 181.], comme le repr��sentant politique le plus accr��dit�� de l'��cole de l'Encyclop��die. [Note: ANTONIN DUBOST. Danton et la politique contemporaine, p. 48; Paris, Fasquelle, 1880.] Le peuple qui, le premier, conquit sur la tyrannie la sainte libert�� est �� ses yeux le premier peuple de l'univers. Il est de ce peuple, lui. De l�� son orgueil, son amour, sa d��votion. Jamais homme n'aima sa race avec autant de fiert�� et de fougue; jamais citoyen ne consentit tant de sacrifices �� son id��al. En effet, Danton n'avait pas comme un Fouch��, un Lebon, un Tallien, �� se tailler une existence nouvelle dans le r��gime nouveau; au contraire. Pourvu d'une charge fructueuse, au sommet de ce Tiers ��tat qui ��tait alors autre chose et plus que notre grande bourgeoisie contemporaine, la R��volution ne pouvait que lui apporter la ruine d'une existence laborieuse mais confortable, ais��e, paisible. Elle vint, cette R��volution attendue, esp��r��e, souhait��e, elle vint et cet homme fut �� elle. Il aimait son foyer, cela nous le savons, on l'a prouv��, d��montr��; il quitta ce foyer, et il fut �� la chose publique. Nous connaissons les angoisses de sa femme pendant la nuit du 10 ao?t. Cette femme, il l'aimait, il l'aima au point de la faire exhumer, huit jours apr��s sa mort, pour lui donner le baiser supr��me de l'adieu; et pourtant, il laissa l�� sa femme pour se donner �� la neuve R��publique. Il quitta tout, sa vieille m��re (et il l'adorait, on le sait), son foyer, pour courir dans la Belgique enflammer le courage des volontaires. Dans tout cela il apportait un esprit d'abn��gation sans exemple. Il sacrifiait sa m��moire, sa gloire, son nom, son honneur �� la Patrie. "Que m'importe d'��tre appel�� buveur de sang, pourvu que la patrie soit sauv��e!" Et il la sauvait. Il ��tait f��roce, oui, �� la tribune, quand il parlait des ennemis de son pays. Il en appelait aux mesures violentes, extr��mes,
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