Carnet dun inconnu

Fyodor Dostoyevsky
Carnet d'un inconnu

Project Gutenberg's Carnet d'un inconnu, by Fédor Mikhaïlovitch Dostoïevski This
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Title: Carnet d'un inconnu (Stépantchikovo)
Author: Fédor Mikhaïlovitch Dostoïevski
Release Date: April 5, 2005 [EBook #15557]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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Fédor Mikhaïlovitch Dostoïevski

CARNET D'UN INCONNU
(STÉPANTCHIKOVO)

traduit du russe par J.-W. Bienstock et Charles Torquet -- 1906

Table des matières
PREMIÈRE PARTIE I INTRODUCTION II MONSIEUR BAKHTCHEIEV III MON
ONCLE IV LE THÉ V ÉJÉVIKINE VI LE BOEUF BLANC ET KAMARINSKI LE
PAYSAN VII FOMA FOMITCH VIII DÉCLARATION D'AMOUR IX VOTRE
EXCELLENCE X MIZINTCHIKOV XI UN GRAND ÉTONNEMENT XII LA
CATASTROPHE SECONDE PARTIE I LA POURSUITE II NOUVELLES III LA
FÊTE D'ILUCHA IV L'EXIL V FOMA FOMITCH ARRANGE LE BONHEUR
GÉNÉRAL VI CONCLUSION

PREMIÈRE PARTIE

I INTRODUCTION
Sa retraite prise, mon oncle, le colonel Yégor Ilitch Rostaniev, se retira dans le village de

Stépantchikovo où il vécut en parfait hobereau. Contents de tout, certains caractères se
font à tout; tel était le colonel. On s'imaginerait difficilement homme plus paisible, plus
conciliant et, si quelqu'un se fût avisé de voyager sur son dos l'espace de deux verstes,
sans doute l'eût-il obtenu. Il était bon à donner jusqu'à sa dernière chemise sur première
réquisition.
Il était bâti en athlète, de haute taille et bien découplé, avec des joues roses, des dents
blanches comme l'ivoire, une longue moustache d'un blond foncé, le rire bruyant, sonore
et franc, et s'exprimait très vite, par phrases hachées. Marié jeune, il avait aimé sa femme
à la folie, mais elle était morte, laissant en son coeur un noble et ineffaçable souvenir.
Enfin, ayant hérité du village de Stépantchikovo, ce qui haussait sa fortune à six cents
âmes, il quitta le service et s'en fut vivre à la campagne avec son fils de huit ans, Hucha,
dont la naissance avait coûté la vie de sa mère, et sa fillette Sachenka, âgée de quinze ans,
qui sortait d'un pensionnat de Moscou où on l'avait mise après ce malheur. Mais la
maison de mon oncle ne tarda pas à devenir une vraie arche de Noé. Voici comment.
Au moment où il prenait sa retraite après son héritage, sa mère, la générale Krakhotkine,
perdit son second mari, épousé quelque seize ans plus tôt, alors que mon oncle, encore
simple cornette, pensait déjà à se marier.
Longtemps elle refusait son consentement à ce mariage, versant d'abondantes larmes,
accusant mon oncle d'égoïsme, d'ingratitude, d'irrespect. Elle arguait que la propriété du
jeune homme suffisait à peine aux besoins de la famille, c'est-à-dire à ceux de sa mère
avec son cortège de domestiques, de chiens, de chats, etc. Et puis, au beau milieu de ces
récriminations et de ces larmes, ne s'était-elle pas mariée tout à coup avant son fils? Elle
avait alors quarante-deux ans. L'occasion lui avait paru excellente de charger encore mon
pauvre oncle, en affirmant qu'elle ne se mariait que pour assurer à sa vieillesse l'asile
refusé par l'égoïste impiété de son fils et cette impardonnable insolence de prétendre se
créer un foyer.
Je n'ai jamais pu savoir les motifs capables d'avoir déterminé un homme aussi raisonnable
que le semblait être feu le général Krakhotkine à épouser une veuve de quarante-deux ans.
Il faut admettre qu'il la croyait riche. D'aucuns estimaient que, sentant l'approche des
innombrables maladies qui assaillirent son déclin, il s'assurait une infirmière. On sait
seulement que le général méprisait profondément sa femme et la poursuivait à toute
occasion d'impitoyables moqueries.
C'était un homme hautain. D'instruction moyenne, mais intelligent, il ne s'embarrassait
pas de principes, ne croyant rien devoir aux hommes ni aux choses que son dédain et ses
railleries et, dans sa vieillesse, les maladies, conséquences d'une vie peu exemplaire,
l'avaient rendu méchant, emporté et cruel.
Sa carrière, assez brillante, s'était trouvée brusquement interrompue par une démission
forcée à la suite d'un «fâcheux accident». Il avait tout juste évité le jugement et, privé de
sa pension, en fut définitivement aigri. Bien que sans ressources et ne possédant qu'une
centaine d'âmes misérables, il se croisait les bras et se laissait entretenir pendant les
douze longues années qu'il vécut encore. Il n'en exigeait pas moins un train de vie
confortable, ne regardait pas à la dépense et ne pouvait se passer de voiture. Il perdit
bientôt l'usage de ses deux jambes et passa ses dix dernières années dans un confortable
fauteuil où le promenaient deux grands laquais qui n'entendirent jamais sortir
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