Brancas; Les amours de Quaterquem

Alfred Assollant
Brancas; Les amours de
Quaterquem

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Title: Brancas; Les amours de Quaterquem
Author: Alfred Assollant
Release Date: June 14, 2006 [EBook #18583]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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LES AMOURS DE QUATERQUEM ***

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1--BRANCAS

2--LES AMOURS DE QUATERQUEM

PAR
ALFRED ASSOLLANT

PARIS E. DENTU, ÉDITEUR LIBRAIRE DE LA SOCIÉTÉ DES
GENS DE LETTRES 3, PLACE DE VALOIS, PALAIS-ROYAL
1888

I
Un matin, M. Charles Brancas, avocat à Paris (rue de Tournon, 43, au
premier, la porte à gauche), reçut d'un ami de province la lettre
suivante:
Vieilleville, 6 mai 1845.
«Mon cher ami,
«Si tu ne me prêtes pas ton éloquence pour huit jours, je suis ruiné.
Voici l'affaire:
«Jean-Pierre-Hippolyte Ripainsel (en 1793 Caïus-Gracchus Ripainsel),
mon oncle, ancien garçon meunier, vient de mourir laissant deux
millions. Je passe sur la douleur que ce funeste événement a causée à
ses nombreux amis. Entre nous, le défunt était un ladre vert qui n'a
jamais donné un centime à qui que ce soit, mais qui obligeait volontiers
le premier venu à vingt, trente ou quarante pour cent. Il s'est acquis par
là, dans le pays, la plus grande considération. L'histoire dit que le vieux
reître, qui fut, je ne sais comment, d'abord commis aux vivres, puis
fournisseur général, a fait jeûner plus d'une fois les soldats de la
République et de l'Empire, qu'il les a vêtus de draps à demi-brûlés,

chaussés de souliers de carton, et abreuvés de piquettes horribles où les
eaux poétiques du Rhin, du Tage et du Garigliano entraient pour une
bonne moitié; mais ce sont des commérages qui ne méritent pas qu'on
les relève.
«Tout cancre qu'il était, Caïus-Gracchus Ripainsel (alias
Jean-Pierre-Hippolyte) a trouvé bon de restituer, après décès, bien
entendu, car le brave homme de son vivant, n'aurait pas lâché la plus
petite obole. Restituer, c'est une idée assez naturelle, pourvu qu'on
restitue à ceux qu'on a dépouillés, ou aux pauvres; mais
Caïus-Gracchus ne l'entend pas ainsi. Il lègue ses deux millions à la
célèbre communauté de P...., afin, dit-il, de donner aux saintes femmes
qui habitent ce couvent la richesse dont elles sont si dignes. Cet acte de
sa dernière volonté me plonge dans la misère.
«Quand je dis que le testament me ruine, tu entends bien que c'est une
figure de rhétorique, car j'ai du foin dans mes bottes, et n'étais pas si sot
que d'attendre pour vivre l'héritage de Caïus-Gracchus; mais c'est une
brèche. Deux millions! d'un seul coup! La captation est notoire. De sa
vie, le défunt ne mit le pied dans une église.
«Le couvent, à qui cette aubaine n'a coûté que quelques tasses de tisane,
s'est hâté de mettre la main sur le mobilier du défunt, et
particulièrement sur un Claude Lorrain, jusqu'ici inconnu, et dont le
Louvre, j'ose le dire, n'a jamais vu l'égal. Imagine, toi qui es
connaisseur, un paysage d'Arménie où les eaux, le soleil, la verdure, les
animaux, les ruines, les arbres et les hommes sont répartis à souhait
pour le plaisir des yeux. Peut-être n'as-tu jamais vu l'Arménie; il
n'importe. Au premier coup d'oeil tu reconnaîtras sans peine qu'elle doit
être ainsi faite ou qu'elle a tort de ne pas l'être. Pour moi, j'en suis
encore ébloui.
«Or, sans parler des deux millions de Caïus-Gracchus, puis-je laisser un
pareil chef-d'oeuvre enseveli au fond d'une cellule, si toutefois il n'est
pas vendu à quelque lord de passage? Vendu aux Anglais! quel
opprobre! Un Claude Lorrain que Caïus-Gracchus avait acheté d'un
prince italien en déconfiture! Tu vois d'ici mon désespoir.

«Donc, pour l'ôter aux Anglais et à la communauté de P..., pour le
rendre au Louvre, qui me le payera bien, j'espère, et qui est la seule
galerie digne d'un tel chef-d'oeuvre, enfin, pour ravoir les deux millions
du vieux Ripainsel et ne pas donner d'armes aux jésuites, je compte sur
ton éloquence. Un petit entrefilet de tes amis du National et du
Constitutionnel, sur l'avidité des légataires de mon oncle, ferait grand
effet dans ce pays-ci et seconderait à merveille ton plaidoyer.
«Je t'attends à Vieilleville dans une semaine. L'affaire sera plaidée le 25
mai; mais il faut que tu connaisses d'avance toutes les circonstances du
procès et toutes les intrigues qui ont amené la donation du vieux
Ripainsel. Ce n'est pas trop d'un
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