20000 Lieues sous les mers | Page 2

Jules Verne
and Pacific steam navigation Company. Donc, ce c��tac�� extraordinaire pouvait se transporter d'un endroit �� un autre avec une v��locit�� surprenante, puisque �� trois jours d'intervalle, le _Governor-Higginson_ et le _Cristobal-Colon_ l'avaient observ�� en deux points de la carte s��par��s par une distance de plus de sept cents lieues marines. Quinze jours plus tard, �� deux mille lieues de l�� l'Helvetia, de la Compagnie Nationale, et le Shannon, du Royal-Mail, marchant �� contrebord dans cette portion de l'Atlantique comprise entre les ��tats-Unis et l'Europe, se signal��rent respectivement le monstre par 42��15' de latitude nord, et 60��35' de longitude �� l'ouest du m��ridien de Greenwich. Dans cette observation simultan��e, on crut pouvoir ��valuer la longueur minimum du mammif��re �� plus de trois cent cinquante pieds anglais, puisque le Shannon et l'Helvetia ��taient de dimension inf��rieure �� lui, bien qu'ils mesurassent cent m��tres de l'��trave �� l'��tambot. Or, les plus vastes baleines, celles qui fr��quentent les parages des ?les Al��outiennes, le Kulammak et l'Umgullick, n'ont jamais d��pass�� la longueur de cinquante-six m��tres, -- si m��me elles l'atteignent.
Ces rapports arriv��s coup sur coup, de nouvelles observations faites �� bord du transatlantique le Pereire, un abordage entre l'Etna, de la ligne Inman, et le monstre, un proc��s-verbal dress�� par les officiers de la fr��gate fran?aise la Normandie, un tr��s s��rieux rel��vement obtenu par l'��tat-major du commodore Fitz-James �� bord du _Lord-Clyde_, ��murent profond��ment l'opinion publique. Dans les pays d'humeur l��g��re, on plaisanta le ph��nom��ne, mais les pays graves et pratiques, l'Angleterre, l'Am��rique, l'Allemagne, s'en pr��occup��rent vivement.
Partout dans les grands centres, le monstre devint �� la mode ; on le chanta dans les caf��s, on le bafoua dans les journaux, on le joua sur les th��atres. Les canards eurent l�� une belle occasion de pondre des oeufs de toute couleur. On vit r��appara?tre dans les journaux -- �� court de copie -- tous les ��tres imaginaires et gigantesques, depuis la baleine blanche, le terrible ? Moby Dick ? des r��gions hyperbor��ennes, jusqu'au Kraken d��mesur��, dont les tentacules peuvent enlacer un batiment de cinq cents tonneaux et l'entra?ner dans les ab?mes de l'Oc��an. On reproduisit m��me les proc��s-verbaux des temps anciens les opinions d'Aristote et de Pline, qui admettaient l'existence de ces monstres, puis les r��cits norv��giens de l'��v��que Pontoppidan, les relations de Paul Heggede, et enfin les rapports de M. Harrington, dont la bonne foi ne peut ��tre soup?onn��e, quand il affirme avoir vu, ��tant �� bord du Castillan, en 1857, cet ��norme serpent qui n'avait jamais fr��quent�� jusqu'alors que les mers de l'ancien Constitutionnel.
Alors ��clata l'interminable pol��mique des cr��dules et des incr��dules dans les soci��t��s savantes et les journaux scientifiques. La ? question du monstre ? enflamma les esprits. Les journalistes, qui font profession de science en lutte avec ceux qui font profession d'esprit, vers��rent des flots d'encre pendant cette m��morable campagne ; quelques-uns m��me, deux ou trois gouttes de sang, car du serpent de mer, ils en vinrent aux personnalit��s les plus offensantes.
Six mois durant, la guerre se poursuivit avec des chances diverses. Aux articles de fond de l'Institut g��ographique du Br��sil, de l'Acad��mie royale des sciences de Berlin, de l'Association Britannique, de l'Institution Smithsonnienne de Washington, aux discussions du The Indian Archipelago, du Cosmos de l'abb�� Moigno, des Mittheilungen de Petermann, aux chroniques scientifiques des grands journaux de la France et de l'��tranger, la petite presse ripostait avec une verve intarissable. Ses spirituels ��crivains parodiant un mot de Linn��, cit�� par les adversaires du monstre, soutinrent en effet que ? la nature ne faisait pas de sots ?, et ils adjur��rent leurs contemporains de ne point donner un d��menti �� la nature, en admettant l'existence des Krakens, des serpents de mer, des ? Moby Dick ?, et autres ��lucubrations de marins en d��lire. Enfin, dans un article d'un journal satirique tr��s redout��, le plus aim�� de ses r��dacteurs, brochant sur le tout, poussa au monstre, comme Hippolyte, lui porta un dernier coup et l'acheva au milieu d'un ��clat de rire universel. L'esprit avait vaincu la science.
Pendant les premiers mois de l'ann��e 1867, la question parut ��tre enterr��e, et elle ne semblait pas devoir rena?tre, quand de nouveaux faits furent port��s �� la connaissance du public. Il ne s'agit plus alors d'un probl��me scientifique �� r��soudre, mais bien d'un danger r��el s��rieux �� ��viter. La question prit une tout autre face. Le monstre redevint ?lot, rocher, ��cueil, mais ��cueil fuyant, ind��terminable, insaisissable.
Le 5 mars 1867, le Moravian, de Montr��al Oc��an Company, se trouvant pendant la nuit par 27��30' de latitude et 72��15' de longitude, heurta de sa hanche de tribord un roc qu'aucune carte ne marquait dans ces parages. Sous l'effort combin�� du vent et de ses quatre cents chevaux-vapeur, il marchait �� la vitesse de treize noeuds. Nul doute que sans la qualit�� sup��rieure de sa coque, le Moravian, ouvert au choc,
Continue reading on your phone by scaning this QR Code

 / 175
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.